Maîtriser le ruissellement érosif par les pratiques agricoles à l'échelle d'un bassin versant. Complémentarité d'une analyse des contraintes d'organisation du travail au sein de l'exploitation agricole et d'une analyse des réseaux techniques d'agriculteurs. - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2006

Maîtriser le ruissellement érosif par les pratiques agricoles à l'échelle d'un bassin versant. Complémentarité d'une analyse des contraintes d'organisation du travail au sein de l'exploitation agricole et d'une analyse des réseaux techniques d'agriculteurs.

Résumé

Le ruissellement érosif dans les bassins versants agricoles de la plaine loessique du Nord de l’Europe posent de nombreux problèmes principalement en dehors du territoire agricole : inondations, coulées d’eau boueuses, dépôts de limons sur les routes à l’origine d’accidents de la route, etc. Les processus physiques à l’origine de ces dégâts sont aujourd’hui bien connus : à l’échelle parcellaire se forme à la surface du sol une croûte de battance du fait de la très faible stabilité structurale des sols limoneux de ces régions. En conséquence, la capacité d’infiltration à la surface du sol diminue rapidement, et du ruissellement de surface apparaît, même lorsque les pluies sont de faible intensité. Ce ruissellement est ensuite concentré dans les traces de roues des tracteurs et les talwegs, acquérant ainsi une vitesse suffisante pour créer des incisions linéaires. Son accumulation à l’échelle du bassin versant provoquent des inondations à l’aval. Nous sommes donc là face un problème environnemental qui doit être maîtrisé au niveau du bassin versant, en plus des actions au niveau de la parcelle mises en place pour limiter la production de ruissellement dès l’origine. Ce fonctionnement écologique a d’ailleurs été concrétisé au niveau du département de la Seine-Maritime par la création d’entité de gestion dont les territoires d’action correspondent à des bassins versant. Des syndicats de bassin versant ont ainsi été créés à partir de 2000 pour les principaux fleuves côtiers et rivières de Seine-Maritime. Parmi les solutions envisageables, il est possible de construire des bassins de rétention à l’exutoire des bassins versant, de façon à protéger les zones d’habitation situées à l’aval. Cependant si ces aménagements sont nécessaires pour se prémunir des dégâts occasionnés par des événements pluvieux intenses, ils se comblent rapidement du fait des sédiments déposés en hiver lors d’événements pluvieux peu intenses mais très fréquents. Il est alors envisageable de limiter cette sédimentation par des pratiques culturales durant l’interculture qui limitent la production de ruissellement et diminuent les départs de terre : il s’agit du déchaumage des chantiers de récolte avec une déchaumeuse à socs ou bien de l’implantation d’une culture intermédiaire. Au niveau du département de la Seine Maritime, une opération de promotion de l’implantation de moutarde durant l’interculture est réalisée, avec en particulier la distribution de semences gratuites. Cependant la réalisation de ces opérations culturales supplémentaires en interculture pose des problèmes dans les exploitations agricoles du fait des concurrences de travail avec les travaux de récolte et de semis. Nous avons donc étudié dans un premier temps l’organisation du travail au niveau des exploitations du bassin versant de Bourville, dans le Pays de Caux. Nous avons mis enévidence que certaines exploitations avaient des marges de manoeuvre pour réaliser des opérations supplémentaires en interculture. En revanche, d’autres agriculteurs ne peuvent pas les réaliser, et cela réduit significativement l’efficacité des changements proposés à l’échelle du bassin versant. L’évaluation des modifications proposées à l’échelle du bassin versant a été possible grâce au modèle STREAM (Sealing and Transfer by Runoff and Erosion related to Agricultural Management). Ce modèle permet de simuler le ruissellement et l’érosion à l’échelle d’un bassin versant en tenant compte des relations spatiales entre parcelles. Par ailleurs il permet de prendre en compte l’effet des pratiques culturales sur le ruissellement et l’érosion, dans la mesure où le modèle : - est basé sur les caractéristiques d’état de surface du sol qui sont directement modifiées par les pratiques culturales, - calcule un réseau d’écoulement du ruissellement en prenant en compte les fourrières et dérayures. Pour dépasser ces contraintes d’organisation du travail, une solution consiste à proposer que les agriculteurs qui ont le plus de temps puissent intervenir chez ceux qui n’en ont pas pour réaliser les opérations de déchaumage à socs ou de semis de cultures intermédiaires. Nous avons alors formalisé les réseaux sociaux des agriculteurs du bassin versant correspondant aux relations de travail et de dialogues techniques. L’analyse de ces réseaux montre qu’il y a de nombreuses relations entre les agriculteurs, y compris d’une commune à l’autre, et que ce réseau est assez hiérarchisé. Nous avons mis en évidence les cliques, groupes d’agriculteurs liés par leur rapprochement social. Nous avons alors croisé ces résultats avec ceux obtenus sur les marges de manoeuvre afin de voir si au sein de ces cliques, il existe des possibilités que des agriculteurs implantent des intercultures chez d’autres. Les résultats montrent que dans deux des trois principales cliques identifiées, il y a à la fois des agriculteurs avec des marges de manoeuvre et des agriculteurs ayant de fortes contraintes d’organisation du travail. Dans le troisième cliques, les agriculteurs ont tous des marges de manoeuvre. En conclusion, la connaissance de réseaux techniques d’agriculteurs pourrait servir de base à une préconisation différente, au niveau de groupes d’agriculteur, pour la mise en oeuvre d’opérations culturales en interculture. Il faut toutefois noter que coopérer entre agriculteurs pour résoudre des questions d'environnement n’est pas équivalent à coopérer dans une optique de production. Il n’est pas certain que les formes des réseaux soient les mêmes pour des questions d’environnement que pour des questions techniques. Cette question devra être informée au fur à mesure que des actions se mettront en place. Par ailleurs, une dynamique collective d’agriculteurs sur un territoire sera d’autant plus facile à initier que les autres acteurs, en particulier les collectivités territoriales, auront eux aussi contribué à limiter le ruissellement et l’érosion. Les animateurs de syndicat de bassin versant ont ainsi remarqué qu’il était plus facile de mobiliser les agriculteurs lorsque des aménagements avaient déjà été construits. Ils se sentaient ainsi en partie responsables de la pérennité de ces aménagements.
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Dates et versions

hal-01458467 , version 1 (04-06-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-01458467 , version 1
  • PRODINRA : 16591

Citer

Alexandre Joannon, Anne Mathieu, Bénédicte Lapierre. Maîtriser le ruissellement érosif par les pratiques agricoles à l'échelle d'un bassin versant. Complémentarité d'une analyse des contraintes d'organisation du travail au sein de l'exploitation agricole et d'une analyse des réseaux techniques d'agriculteurs.. Séance de l'Académie d'Agriculture de France : Préservation des ressources naturelles à l'échelle locale, Jan 2006, Paris, France. ⟨hal-01458467⟩
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