Cette étude doit servir de base à la communication qui sera faite au 20e Colloque du CIRIEC (Centre international de recherches et d'information l'économie publique, sociale et coopérative) en Autriche en 1994. Le modèle Schulze-Delitzsch fut adapté aux conditions du monde agricole français de la fin du 19e siècle au moyen de deux "transgressions" : l'une en direction de l'"intérêt général" (sous l'influence d'un syndicalisme corporatiste), l'autre en direction de l'"utilité publique" (sous l'influence du pouvoir politique, et surtout du radicalisme, instigateur du "solidarisme républicain"). C'est ce mode d'organisation originel, avec ses caractères intrinsèques consolidés par le droit positif de 1906 à 1959, qui se trouvera remis en cause à partir de 1961, alors que le rôle d'intérêt général se réduit sous l'effet de l'éclatement syndical, que celui d'utilité publique ne subsiste partiellement que pour changer de signification et d'objectif, et qu'à la suite d'une troisième "transgression", les sociétés et les groupes coopératifs tendent à adopter les structures et les comportements des sociétés de capitaux, mais en conservant cependant, jusqu'à ce jour, certains caractères spécifiques. Nous nous sommes efforcés de mettre en relation, à partir de 1959, les changements institutionnels relatifs aux organismes coopératifs (SICA, groupements de producteurs, interprofession, ordonnance de 1967, lois de 1972, de 1991 et de 1992) avec les initiatives et les changements des organisations syndicales et de la politique agricole, au fil des crises économiques.