La question de la production de paysages par l'activité d'élevage pastoral est abordée dans une vallée de montagne du Centre Est de la Corse. Il s'afgit de comprendre, dans un premier temps, comment l'éleveur organise son territoire fourrager (surface, formes, disposition des parcelles cultivées) et son mode de conduite du troupeau au cours de l'année. Mais il convient également de tenter de savoir comment l'éleveur perçoit et se représente l'espace dans lequel il délimite son propre territoire pastoral. Des suivis zootechniques (performances du troupeau) et des suivis de pratiques (manière de faire de l'éleveur), ainsi que des séries d'entretiens pour l'analyse du discours sont réalisés en 1995 chez 10 éleveurs (9 ovins et 1 caprin). Les résultats montrent une même conduite zootechnique mais des configurations de territoires pastoraux très diverses. En effet, le territoire pastoral de chaque élevage est essentiellement constitué de terres à parcours (70%) avec une végétation arbustive et d'un ensemble de prairies (naturelles et cultivées) aux surfaces très variables. L'utilisation de ces 2 ensembles, estimée par le temps de présence du troupeau, est fonction des saisons et diffère entre les élevages. La période automnale, qui correspond au démarrage du cycle de production, est stratégique et voit l'utilisation préférentielle des prairies. Quant aux représentations que se font les éleveurs de l'espace, il apparaît un point central qui est la bergerie à partir duquel s'élabore une vision de l'espace en couche concentriques : les plus proches sont celles où l'éleveur maîtrise le foncier et réalise des investissements alors que les plus éloignées ne font l'objet d'aucun travail et peuvent même être utilisées en commun avec d'autres éleveurs. Ainsi, chez l'éleveur, il semble exister une gradation de la valeur du territoire où le discours sur des opérations collectives (aménagement de l'espace) ou sur l'intérêt général (valeurs hédoniques, patrimoine paysager) n'a pas encore sa place