L’objectif de cet article est de montrer la pertinence de la sociologie des agencements marchands, issue de la théorie de l’acteur-réseau, pour étudier la création de réseaux agri-alimentaires alternatifs. Les auteurs partent du constat que la plupart des recherches sur les réseaux agri-alimentaires alternatifs ne retracent que sommairement, à titre strictement informatif, les conditions dans lesquelles de nouveaux systèmes d’échanges sont établis. Ils présentent ensuite comment la sociologie des agencements marchands analyse la construction de marchés innovants. La pertinence de ce cadre théorique est montrée en prenant appui sur une expérimentation visant la création d’un système d’échange territorial entre du fumier issu de fermes spécialisées en élevage et des cultures (céréales, luzerne) issues de fermes de céréaliculteurs. En mobilisant les concepts de la sociologie des agencements marchands, les auteurs mettent au jour les opérations nécessaires à la constitution d’un réseau agri-alimentaire alternatif et soulignent les difficultés associées à chacune d’entre elles. Cela leur permet de porter un regard renouvelé sur les phénomènes d’hybridation alternatif-conventionnel et de verrouillages sociotechniques.