La réforme foncière de 1998 en Côte d’Ivoire à la lumière de l’histoire des dispositifs de sécurisation des droits coutumiers. Une économie politique de la question des transferts de droits entre autochtones et «étrangers» en Côte d’Ivoire forestière - INRAE - Institut national de recherche pour l’agriculture, l’alimentation et l’environnement Accéder directement au contenu
Communication Dans Un Congrès Année : 2006

The 1998 Ivorian land reform in the history of customary land rights policies. A political economy of customary transfers between autochthons and strangers in the Ivorian forest belt

La réforme foncière de 1998 en Côte d’Ivoire à la lumière de l’histoire des dispositifs de sécurisation des droits coutumiers. Une économie politique de la question des transferts de droits entre autochtones et «étrangers» en Côte d’Ivoire forestière

Résumé

The recent 1998 land reform in Côte d’Ivoire, yet to be implemented, aims to acknowledge and entitle the customary rights, in a context of land conflicts between locals and migrant cocoa farmers in the forest belt of the country. The legal change seems to be extremely innovative regarding the former legislation and its colonial legacy, which was based on a very centralized titling system. The paper suggests an alternative political economy-based analysis of the so-called innovative dimension of the law. Historically, the key stake of the customary land rights policies since the colonial period, including the recent law, was not so much to make the customary rights more secure, but to enforce the power of the national elite over land transfers between autochthons and migrants, particularly in the western pioneer front of the Ivorian forest belt. The main conclusions are the following ones: 1) The recent law does not depart from this trend. 2) However, the recent law departs from the historical trend according to which more favourable positions were given to the strangers. 3) However, the 1998 law does not completely innovate. Basically, it resumes the provisions of the1955 and 1956 colonial decrees, which were also implemented in order to cope with acute economic, social and political tensions, and which have been buried after the independence. 4) However, the “legal production” is not sufficient to enforce political elite’s preferences. It is a political and clientelistic locally centred action that is decisive. 5) In this perspective, making the customary land rights more secure is depending less on the legal technical aspect than on the political dimension inherent to public policy. The “social working” of the law matters as much as the contents of the law. The rebounds during the drawing up of the recent law underline that the provisions and rationale of the law echo back the main and antagonistic components of political agrarian history of Côte d’Ivoire, specially the state regulation of the customary social institution of “tutorat”. The issue at stake in the implementation of the law is the local anchorage of the state authority and legitimacy. 6) Finally, one is tempted to think that the more urgent question is : What to do with the 1998 law ?
Dans un contexte général de tensions entre autochtones et migrants dans la zone forestière, la nouvelle loi sur le domaine foncier rural de 1998 en Côte d’Ivoire, non encore appliquée, se propose de valider par certification puis par des titres de propriété les droits coutumiers ou acquis selon des procédures coutumières. Elle innove considérablement par rapport à la législation foncière ivoirienne héritée de l’époque coloniale. Cette contribution replace la nouvelle loi et son caractère juridiquement innovant dans l’histoire de la production juridique concernant la question des droits coutumiers en Côte d’Ivoire, à partir d’une approche en termes d’économie politique. Cette approche part de l’idée qu’historiquement, l’enjeu principal des politiques d’enregistrement des droits par l’enregistrement n’est pas tant la sécurisation des droits coutumiers que le contrôle par les élites politiques nationales des transferts entre les détenteurs de droits issus de l’autochtonie et les migrants, notamment dans la zone de colonisation agraire de l’Ouest forestier. Les principales conclusions sont les suivantes : 1) La nouvelle loi de 1998 ne déroge pas à la tradition. 2) Toutefois, la nouvelle législation va à l’encontre de la tendance historique générale qui a été de favoriser les étrangers. 3) Cependant, la loi de 1998 n’innove pas en la matière. Elle reprend l’esprit des décrets coloniaux de 1955 et de 1956, promulgués comme la loi actuelle dans un contexte de profondes recompositions économique, sociale et politique, et qui ont été « enterrés » à l’indépendance. 4) La sécurisation foncière des droits dépend moins de la dimension technique du dispositif juridique que de la dimension politique inhérente à l’intervention publique. Pour cette raison, ce n’est pas l’action par la voie légale qui est la plus efficace pour traduire la politique de redistribution des droits poursuivie par les élites politiques, mais l’intervention par les voies informelles de la « pratique administrative ‘coutumière’ ». 5) La mise en perspective historique de la loi de 1998 et les rebondissements dans le processus de son élaboration montrent que le contenu et les référentiels de la loi cristallisent toute une trajectoire politique concernant l’ancrage local de l’État ivoirien et son contrôle sur les transferts coutumiers de droits (en particulier dans le cadre de la relation de « tutorat » dans les régions de la frontière agricole de l’Ouest). 6) La question la plus urgente à se poser est : Que faire de la loi de 1998 ?

Mots clés

Fichier non déposé

Dates et versions

hal-02756333 , version 1 (03-06-2020)

Identifiants

  • HAL Id : hal-02756333 , version 1
  • PRODINRA : 9393

Citer

Jean-Pierre Chauveau. La réforme foncière de 1998 en Côte d’Ivoire à la lumière de l’histoire des dispositifs de sécurisation des droits coutumiers. Une économie politique de la question des transferts de droits entre autochtones et «étrangers» en Côte d’Ivoire forestière. Colloque international : Les frontières de la question foncière : enchâssement social des droits et politiques publiques, May 2006, Montpellier, France. ⟨hal-02756333⟩
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